dimanche 18 octobre 2009

Cour de cassation
chambre criminelle
Audience publique du mercredi 21 janvier 2009
N° de pourvoi: 08-84240
Non publié au bulletin Cassation

M. Le Gall (conseiller le plus ancien faisant fonction de président), président
SCP Yves et Blaise Capron, avocat(s)



REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :


-
X... Alexandre,


contre le jugement de la juridiction de proximité de Nîmes, en date du 7 mai 2008, qui, pour excès de vitesse, l'a condamné à 135 euros d'amende ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, des articles L. 130-9 et R. 413-14 du code de la route et des articles préliminaire, 429, 529-2, 529-10, 537, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

"en ce que le jugement attaqué a rejeté les exceptions de nullité soulevées par Alexandre X..., a déclaré Alexandre X... coupable de la contravention d'excès de vitesse d'au moins 20 kilomètres à l'heure et inférieur à 30 kilomètres à l'heure par un conducteur de véhicule à moteur et l'a condamné, en conséquence, à une amende contraventionnelle de 135 euros ;

"aux motifs que, sur l'exception de nullité du procès-verbal soulevé in limine litis, l'article L. 130-9 du code de la route précise que lorsqu'elles sont effectuées par des appareils de contrôle automatisé ces constatations peuvent faire l'objet d'une signature manuelle numérisée, que la jurisprudence de la cour de cassation valide le fait que le signataire du procès-verbal peut être le rédacteur du procès-verbal et non le gendarme opérateur, que tel est le cas ; que l'article L. 130-9 du code de la route donne compétence à la juridiction de proximité du lieu de constatation de l'infraction et que les articles 539 et suivants du code de procédure pénale donnent compétence à l'Omp du lieu de la demande du requérant, que le soit transmis du 24 mai 2007 a bien été réceptionné par l'Omp de Nîmes comme l'atteste le réquisitoire aux fins de citation établi le 6 mars 2008 par l'Omp de Nîmes ; que la juridiction de proximité est donc régulièrement saisie et compétente ; que les exceptions soulevées par le prévenu seront rejetées ; que sur les autres exceptions : sur l'atteinte aux droits de la défense : la procédure de consignation est prévue par les textes législatifs et réglementaires, que ces textes prévoient la restitution de la consignation en cas de relaxe du prévenu et ne constitue pas une reconnaissance de responsabilité comme le précise l'article 529-10 du code de procédure pénale, que la présomption d'innocence est donc respectée ainsi que les droits de la défense ; sur le vice de forme propre au contrôle de vitesse : la loi du 12 juin 2003 reprise dans l'article L. 130-9 du code de la route renforçant la lutte contre la violence routière précise que les constatations de la vitesse des véhicules peuvent être effectuées par des appareils de contrôle automatiques homologués, dont les constatations font foi jusqu'à preuve contraire ; que l'arrêté du 7 janvier 1991, en son article 2 relatif à la construction, au contrôle et aux modalités techniques d'utilisation des cinémomètres de contrôle routiers, et le décret du 6 mai 1988 n° 88/282 relatif au contrôle des instruments de mesures précisent que les cinémomètres sont soumis à des opérations de contrôle, savoir : l'approbation du modèle, la vérification primitive des instruments neufs, la vérification annuelle des instruments en service, la réparation par un réparateur agréé et la vérification après réparation ou modification ; que l'article 14 de l'arrêté du 7 janvier 1991 prévoit que les cinémomètres doivent être installés et utilisés conformément aux prescriptions visées dans la décision d'approbation du modèle ; que toutefois, aucun texte n'impose que mention soit faite dans le procès-verbal de la mise en oeuvre de ces mesures, ni de précisions sur l'environnement du lieu de contrôle ; que l'absence de mention sur le procès-verbal de la date et de l'heure de l'essai préalable du cinémomètre n'emporte donc pas la nullité dudit procès-verbal (Cour de cassation chambre criminelle 18 février 2006 pourvoi n° 05-85.579 et même chambre le 20 décembre 2000 pourvoi n° 00-683697) ; que sur le défaut de précision sur le lieu de l'infraction : le procès-verbal et la photo précisent que le lieu exact du contrôle de vitesse en mentionnant le PK ainsi que la commune sur laquelle l'infraction a été constatée ; que ces indications fondamentales sont bien reprises sur le procès-verbal et les autres documents et permettent ainsi à la défense et au juge de vérifier la réglementation applicable au lieu de l'infraction ; que la nullité soulevée est rejetée ; sur l'absence d'indication du conducteur sur la photo de l'infraction : lors de l'audition du prévenu reprise dans le procès-verbal du 30 janvier 2008, le prévenu reconnaît être le conducteur du véhicule pris en photo, peu importe que la photographie du véhicule ne permette pas d'identifier le conducteur le conducteur ; que cette nullité sera rejetée ; que sur l'action publique : Alexandre X... est poursuivi pour avoir, à Brignon, (RN 106 PK/PR : 017.500), le 22/03/2007, avec le véhicule immatriculé 766 YL 30 : commis un excès de vitesse d'au moins 20 km/h et inférieur à 30 km/h par conducteur de véhicule à moteur (vitesse limite autorisée : 50 km/h - vitesse mesurée : 75 km/h - vitesse retenue : 70 km/h) Faits prévus et réprimés par art. R. 413-14 § I, alinéa 1, du code de la route, art. R. 413-14 § I, alinéa 1, du code de la route ; qu'il est suffisamment établi qu'Alexandre X... a bien commis les faits qui lui sont reprochés ; il convient de le déclarer coupable, d'entrer en voie de condamnation à son encontre et de le condamner à une amende contraventionnelle de cent trente-cinq euros (135 euros) pour excès de vitesse d'au moins 20 km/h et inférieur à 30 km/h par conducteur de véhicule à moteur » (cf., jugement attaqué, p. 3 à 5) ;

"alors que, de première part, les procès-verbaux ou rapports doivent être rédigés et signés par les seuls agents ayant pris une part personnelle et directe à la constatation des faits qui constituent l'infraction ; qu'en se bornant, dès lors, à énoncer, pour écarter l'exception de nullité soulevée par Alexandre X... tirée de ce que l'agent auteur et signataire du procès-verbal d'infraction dressé le 23 mars 2007, soit le lendemain des faits litigieux, agent qui était différent de celui ayant mis en oeuvre le cinémomètre, n'avait pas participé personnellement à la constatation de l'infraction d'excès de vitesse qui lui était reprochée, que la jurisprudence de la Cour de cassation considère comme valide le fait que le signataire d'un procès-verbal d'infraction soit son rédacteur, et non le gendarme ayant mis en oeuvre le cinémomètre, sans relever que l'agent auteur et signataire du procès-verbal d'infraction dressé le 23 mars 2007 avait joué un quelconque rôle dans la constatation de l'infraction, par exemple en ayant reçu et consigné, alors qu'il se trouvait sur les lieux de l'infraction, les indications de l'agent ayant mis en oeuvre le cinémomètre, et avait ainsi pris, d'une quelconque façon, une part personnelle et directe à la constatation des faits qui étaient reprochés à Alexandre X..., la juridiction de proximité a violé les dispositions susvisées ;

"alors que, de deuxième part, les dispositions de l'article 529-10 du code de procédure pénale, qui subordonnent la recevabilité de la requête en exonération prévue par l'article 529-2 de ce même code à la preuve de ce que la personne concernée a acquitté une consignation préalable d'un montant égal à celui de l'amende forfaitaire, méconnaissent le droit d'accès à un juge et le principe du respect de la présomption d'innocence qui sont reconnus à la personne poursuivie par les stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'en retenant le contraire, la juridiction de proximité a violé les stipulations et dispositions susvisées ;

"alors que, de troisième part, en laissant absolument sans réponse le moyen, péremptoire, soulevé par Alexandre X... tiré de ce que le procès-verbal d'infraction ne permettait pas de connaître les conditions d'installation et d'utilisation du cinémomètre, et, notamment, son lieu d'implantation précis par rapport à la route et les conditions atmosphériques qui prévalaient au moment du contrôle, la juridiction de proximité a entaché son jugement d'un défaut de réponse à conclusions et, partant, a entaché sa décision d'une insuffisance de motifs ;

"alors que, de quatrième part, qu'en énonçant, pour écarter l'argumentation développée par Alexandre X... tenant à ce que la photographie prise lors du contrôle de vitesse ne permettait pas d'identifier le conducteur du véhicule automobile de marque Chrysler et de modèle Pt Cruiser, immatriculé 766 YL 30, photographié, que, lors de son audition reprise dans le procès-verbal d'audition du 30 janvier 2008, Alexandre X... avait reconnu être le conducteur du véhicule automobile pris en photographie lors du contrôle de vitesse et que peu importait, en conséquence, que la photographie prise lors du contrôle de vitesse ne permît pas d'identifier le conducteur, quand le procès-verbal d'audition d'Alexandre X... du 30 janvier 2008 indiquait qu'Alexandre X... avait reconnu être le conducteur du véhicule automobile de marque Chrysler et de modèle Pt Cruiser, immatriculé 766 YL 30, et, donc, en avoir été son conducteur habituel, et non avoir été le conducteur de ce véhicule automobile au jour et à l'heure où la photographie avait été prise, la juridiction de proximité a dénaturé les termes clairs et précis du procès-verbal d'audition d'Alexandre X... du 30 janvier 2008 ;

"alors que, de cinquième part et à titre subsidiaire, à supposer même qu'il soit retenu que la juridiction de proximité n'a pas énoncé que, lors de son audition reprise dans le procès-verbal d'audition du 30 janvier 2008, Alexandre X... avait reconnu être le conducteur du véhicule automobile pris en photographie lors du contrôle de vitesse, la juridiction de proximité, en se bornant à relever que, lors de son audition reprise dans le procès-verbal d'audition du 30 janvier 2008, Alexandre X... avait reconnu être le conducteur du véhicule automobile pris en photographie, quand la circonstance qu'une personne, qui n'est pas le titulaire du certificat d'immatriculation d'un véhicule automobile, en est le conducteur habituel est insuffisante à établir que cette personne était le conducteur de ce véhicule automobile à une date et à une heure précises, la juridiction de proximité s'est prononcée par des motifs inopérants, en méconnaissance des dispositions susvisées ;

"alors qu'enfin, en se bornant à énoncer, pour déclarer Alexandre X... coupable de la contravention d'excès de vitesse d'au moins 20 kilomètres à l'heure et inférieur à 30 kilomètres à l'heure par un conducteur de véhicule à moteur, qu'il était suffisamment établi qu'Alexandre X... avait bien commis les faits qui lui étaient reprochés, sans davantage motiver sa décision, et sans, notamment, constater les éléments constitutifs de l'infraction dont elle a déclaré Alexandre X... coupable, ni indiquer sur quels éléments de preuve elle a fondé sa conviction, la juridiction de proximité a entaché sa décision d'un défaut de motifs et violé les stipulations et dispositions susvisées» ;

Vu l'article 593 du code de procédure pénale ;

Attendu que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision et répondre aux chefs péremptoires des conclusions des parties ; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ;

Attendu que, pour déclarer Alexandre X... coupable d'excès de vitesse, le jugement attaqué énonce que "lors de l'audition du prévenu reprise dans le procès-verbal du 30 janvier 2008, le prévenu reconnaît être le conducteur du véhicule pris en photo" ;

Mais attendu qu'en se déterminant ainsi, sans répondre aux conclusions du prévenu qui faisait valoir que, bien que conducteur habituel du véhicule, il n'en était pas le conducteur au moment de la constatation de l'infraction, la juridiction de proximité n'a pas justifié sa décision ;

D'où il suit que la cassation est encourue ;

Par ces motifs :

CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, le jugement susvisé de la juridiction de proximité de Nîmes, en date du 7 mai 2008, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,

RENVOIE la cause et les parties devant la juridiction de proximité de Montpellier, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la juridiction de proximité de Nîmes et sa mention en marge ou à la suite du jugement annulé ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Le Gall conseiller le plus ancien faisant fonction de président en remplacement du président empêché, Mme Lazerges conseiller rapporteur, Mme Chanet conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Lambert ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;



Décision attaquée : Juridiction de proximité de Nîmes du 7 mai 2008

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