lundi 19 octobre 2009

Les PV de stationnement seraient-ils illégaux ?
Par Eolas le Vendredi 11 juillet 2008 à 17:35 :: Actualité du droit :: Lien permanent
Question que se pose la presse (Libération, Le Parisien, Le Figaro…) à la suite d'un jugement de la juridiction de proximité de Versailles (que je n'ai pas pu me procurer) qui estimerait que la contravention de défaut d'affichage du ticket de l'horodateur n'étant prévu par aucun texte, il ne saurait constituer une contravention.
Le lecteur méfiant flairera l'emballement médiatique et, je le crains pour les automobilistes radins qui me lisent, il aura raison.
D'une part, il est téméraire de prendre une décision isolée d'une juridiction de proximité (donc un juge non professionnel) et d'en faire une jurisprudence générale. C'est là plutôt le rôle de la cour de cassation.
D'autre part, il est prudent d'ouvrir son Code de la route avant d'écrire (même si, chère Aliocha, je connais les contraintes d'horaires de bouclage et d'angle…). Certes, la réponse tient du jeu de piste, mais je crains fort qu'elle ne soit néanmoins bien solide.
Car il est vrai que nulle part le Code de la route ne parle de l'affichage du ticket horodateur. De fait, le seul horodateur que connaît la législation routière est celui des taxis, qui indique à l'arrière l'heure à laquelle ils doivent cesser leur service (décret n°95-935 du 17 août 1995, art. 1er, 4°).
C'est en arrêtant là ses recherches que le juge de proximité de Versailles s'est trompé.
Car le Code de la route fixe les règles relatives au stationnement des véhicules sur la voie publique aux articles R. 417-1 et suivants.
L'article R.417-1 précise les règles générales de stationnement en agglomération. Le R.417-2 prévoit la possibilité pour le maire d'imposer sur certaines voies de sa commune un stationnement alterné côté pair/ côté impair. Le R.417-3 prévoit la possibilité pour le maire de créer les zones “bleues” à stationnement gratuit et limité, avec le bon vieux disque, qui a quasiment disparu (essentiellement à cause du concept désormais saugrenu de gratuité). Le R.417-4 prévoit les règles générales de stationnement hors agglomération. Le R.417-5 interdit de se garer sur les passages piétons. Contrairement à une croyance très répandue dans la capitale, il s'applique aussi à Paris. L'article . R.417-7 interdit d'ouvrir sa portière si cette ouverture met autrui en danger ; contrairement à une croyance là aussi très répandue, autrui inclut maître Eolas à vélo dans Paris. L'article R.417-8 interdit le stationnement dangereux. Vous me direz que j'ai oublié le R.417-6. Non point, je l'ai mis de côté, car c'est lui qui nous intéresse.
Que dit-il ?
Tout arrêt ou stationnement gratuit ou payant contraire à une disposition réglementaire autre que celles prévues au présent chapitre est puni de l'amende prévue pour les contraventions de la première classe.
Soit 38 euros d'amende au maximum.
Ce qu'on appelle disposition réglementaire est une règle générale prise par l'autorité administrative. Le pouvoir réglementaire appartient essentiellement au premier ministre, qui signe les décrets. Mais la loi peut habiliter d'autres autorités administratives à prendre de telles dispositions, par délégation, cette délégation devant être limitée dans son objet.
La question qui se pose donc à présent est : la loi permet-elle au maire d'imposer un stationnement payant sur sa commune ?
Réponse : oui, c'est l'article L.2213-6 du Code Général des Collectivités Territoriales (CGCT) :
Le maire peut, moyennant le paiement de droits fixés par un tarif dûment établi, donner des permis de stationnement ou de dépôt temporaire sur la voie publique et autres lieux publics, sous réserve que cette autorisation n'entraîne aucune gêne pour la circulation et la liberté du commerce.
Les modalités de délivrance de ce permis (et le tarif) sont fixés par l'arrêté municipal en question. Notamment, le maire peut prévoir que ces permis seront délivrés par un automate et imposer au conducteur de laisser ce permis apparent sur le pare-brise afin de permettre aux agents municipaux de vérifier le paiement de l'écot.
Supposons que nonobstant les dispositions très claires de l'arrêté municipal que le conducteur aura immanquablement lu avec attention, il s'abstient d'exposer visiblement son ticket, que se passera-t-il ?
Peu importe qu'il ait bien payé l'octroi, la question n'est pas là. Il n'a pas affiché le permis de stationnement, appelé “ticket horodateur” par les mortels. Or l'arrêté municipal exige que ce ticket soit affiché.
Vous avez deviné. En n'affichant point ce permis de stationnement, le conducteur a effectué un stationnement payant contraire à une disposition réglementaire (un arrêté municipal) autre que le chapitre 7 du titre Ier du Chapitre IV de la partie réglementaire du Code de la route (ne soyez pas modestes, je sais que vous aviez deviné), donc puni d'une contravention de la 1e classe.
Ergo, de deux choses l'une. Soit l'automobiliste versaillais a produit l'arrêté municipal en vigueur concernant la voie où il stationnait et a établi que cet arrêté n'exige nullement l'affichage du permis de stationnement MAIS qu'il avait bien payé un tel permis pour les infractions qu'on lui reprochait et a été relaxé à bon droit, sans qu'aucune règle générale applicable hors le chef lieu de canton des Yvelines ne puisse en être tirée. Soit il a plaidé qu'aucun texte dans le code de la route ne prévoit un tel affichage, et le juge l'a suivi sans consulter les arrêtés municipaux en vigueur auquel cas il a commis une erreur de droit.
Dans les deux cas, annoncer à cor et à cris l'illégalité des PV de stationnement me paraît un peu téméraire.
Sans compter qu'il ne s'agit pas de PV mais d'avis de contravention accompagné d'une carte de paiement. Ha, ces journalistes…


http://www.maitre-eolas.fr/post/2008/07/11/1029-les-pv-de-stationnement-seraient-ils-illegaux

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